Urbanisme : l’extension exige-t-elle une déclaration préalable ou un permis de construire

La réalisation d’une extension d’un immeuble bâti répond à un régime juridique différent en fonction

– la surface de plancher créée,

– l’emprise au sol du projet,

– l’existence d’un plan local d’urbanisme,

– la surface de la construction existante.

L’article R.421-17 du Code de l’urbanisme dans sa rédaction issue du Décret n°2014-253 du 27 février 2014 et entré en vigueur le 1er avril suivant dispose en effet que :

« Doivent être précédés d’une déclaration préalable lorsqu’ils ne sont pas soumis à permis de construire en application des articles R*421-14 à *R. 421-16 les travaux exécutés sur des constructions existantes, à l’exception des travaux d’entretien ou de réparations ordinaires, et les changements de destination des constructions existantes suivants :

 a) Les travaux ayant pour effet de modifier l’aspect extérieur d’un bâtiment existant, à l’exception des travaux de ravalement ;

 b) Les changements de destination d’un bâtiment existant entre les différentes destinations définies à l’article R*123-9 ; pour l’application du présent alinéa, les locaux accessoires d’un bâtiment sont réputés avoir la même destination que le local principal ;

 c) Dans les secteurs sauvegardés dont le plan de sauvegarde et de mise en valeur n’est pas approuvé ou dont le plan de sauvegarde et de mise en valeur a été mis en révision, les travaux effectués à l’intérieur des immeubles ;

 d) Les travaux exécutés sur des constructions existantes ayant pour effet de modifier ou de supprimer un élément que le plan local d’urbanisme ou un document d’urbanisme en tenant lieu a identifié, en application du 7° de l’article L. 123-1-5, comme présentant un intérêt patrimonial ou paysager ;

 e) Les travaux exécutés sur des constructions existantes ayant pour effet, dans une commune non couverte par un plan local d’urbanisme, de modifier ou de supprimer un élément, qu’une délibération du conseil municipal, prise après enquête publique, a identifié comme présentant un intérêt patrimonial ou paysager ;

f) Les travaux qui ont pour effet la création soit d’une emprise au sol, soit d’une surface de plancher supérieure à cinq mètres carrés et qui répondent aux critères cumulatifs suivants :

  • une emprise au sol créée inférieure ou égale à vingt mètres carrés ;
  • une surface de plancher créée inférieure ou égale à vingt mètres carrés.

 Ces seuils sont portés à quarante mètres carrés pour les projets situés en zone urbaine d’un plan local d’urbanisme ou d’un document d’urbanisme en tenant lieu, à l’exclusion de ceux impliquant la création d’au moins vingt mètres carrés et d’au plus quarante mètres carrés de surface de plancher ou d’emprise au sol lorsque cette création conduit au dépassement de l’un des seuils fixés à l’article R*431-2 du présent code.

 g) ) la transformation de plus de cinq mètres carrés de surface close et couverte non comprise dans la surface de plancher de la construction en un local constituant de la surface de plancher. »

Ainsi, la création d’une extension supérieure de 24 m² n’ayant pas pour effet de porter la surface de plancher ou l’emprise au sol totale au-delà de 170 m² dans une commune dotée d’un PLU n’est pas soumise à permis de construire.

Il en irait différemment si la commune  n’était pas dotée d’un PLU ou si l’extension aboutissait in fine à porter la surface du plancher ou l’emprise au sol à plus de 170 m².

Le non respect de ces dispositions est passible de sanctions pénales.

Jérôme MAUDET

Avocat

Droit pénal de l’urbanisme et loi ALUR : un renforcement des sanctions

L’article L.480-7 du Code de l’urbanisme a été modifié par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové dite (ALUR)

Cet article prévoyait la possibilité pour le juge judiciaire d’ordonner sous astreinte la remise en état des lieux.

L’astreinte était toutefois cantonnée à 75 euros par jour de retard ce qui pouvait ne pas être dissuasif pour certains constructeurs.

Pour pallier cette difficulté, la loi ALUR porte opportunément le montant de l’astreinte à 500 euros par jour de retard et rappelle que l’exécution provisoire peut être ordonnée par le Tribunal pour éviter les recours dilatoires.

« Le tribunal impartit au bénéficiaire des travaux irréguliers ou de l’utilisation irrégulière du sol un délai pour l’exécution de l’ordre de démolition, de mise en conformité ou de réaffectation ; il peut assortir son injonction d’une astreinte de 500 € au plus par jour de retard.

 L’exécution provisoire de l’injonction peut être ordonnée par le tribunal.

Au cas où le délai n’est pas observé, l’astreinte prononcée, qui ne peut être révisée que dans le cas prévu au troisième alinéa du présent article, court à partir de l’expiration dudit délai jusqu’au jour où l’ordre a été complètement exécuté.

Si l’exécution n’est pas intervenue dans l’année de l’expiration du délai, le tribunal peut, sur réquisition du ministère public, relever à une ou plusieurs reprises, le montant de l’astreinte, même au-delà du maximum prévu ci-dessus.

Le tribunal peut autoriser le reversement ou dispenser du paiement d’une partie des astreintes pour tenir compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter. »

Rappelons que la remise en état, prononcée au titre de l’article L.480-5 du Code de l’urbanisme, étant une mesure à caractère réel, destinée à mettre fin au préjudice de la partie civile, la commune est, elle aussi, bien fondée à solliciter une telle mesure au titre de l’action civile : (Voir notamment en ce sens, Cass. Crim, 22 novembre 1990, N° 90-81.142).

 « Mais attendu que la mise en conformité des lieux ou des ouvrages, la démolition de ces derniers ou la réaffectation du sol, prévues par l’article L. 480-5 du Code de l’urbanisme, constituent des mesures à caractère réel destinées à faire cesser une situation illicite, et non des sanctions pénales ; »

Jérôme MAUDET

Avocat au barreau de Nantes.

 

Stationnement résidentiel ou les limites du droit de l’urbanisme

Interrogée sur la problématique du stationnement résidentiel, la ministre du logement a concédé que le droit de l’urbanisme n’est pas en mesure de régler l’ensemble des problématiques inhérentes à l’occupation du sol.

Texte de la question

M. André Chassaigne attire l’attention de Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement sur les recours possibles des maires suite au non-respect des conditions d’obtention du permis de construire par les propriétaires-bailleurs. En effet, certaines préconisations exigibles pour l’obtention d’un permis de construire ne sont ensuite pas respectées par les demandeurs, propriétaires louant leur logement par exemple. Ainsi, de nombreux maires exigent dans les bourgs-centre la définition de places de stationnement pour tout appartement rénové et loué, ceux-ci devant figurer sur les plans de la construction. Après la réalisation des travaux, les propriétaires font le choix d’exclure la possibilité de se garer aux places représentées dans les baux des locataires. Cette situation entraîne de graves problèmes de circulation sur la voie publique, en particulier dans les bourgs anciens et denses. Un autre exemple récurrent de difficultés peut être soulevé concernant la transformation des garages des habitations en pièce habitable ou aménagée. Là-aussi, ces modifications des fonctions du bâti entraînent une recrudescence des incivilités et stationnements intempestifs en centre-ville, alors même que le stationnement est souvent limité et règlementé. De nombreuses municipalités se retrouvent impuissantes devant ces agissements, et souhaiteraient pouvoir disposer de mesures concrètes pour faire respecter le droit de l’urbanisme. Il souhaiterait donc connaître les possibilités légales d’intervention existantes pour les maires, et si elle prévoit de nouvelles dispositions dans ce domaine.

Texte de la réponse

L’obtention du permis de construire est soumise aux règles du plan local d’urbanisme (PLU). En l’absence de PLU, le règlement national d’urbanisme s’applique, notamment l’article R. 111-6 du code de l’urbanisme. Lors de la délivrance du permis de construire, l’article 12 concernant les règles de stationnement doit être respecté. Toutefois, l’article L. 123-1-12 du code de l’urbanisme prévoit des modalités alternatives pour la satisfaction des obligations de réalisation de stationnements : obtention d’une concession à long terme dans un parc public de stationnement, acquisition des places de stationnement dans un parc privé, ou en dernier ressort, paiement d’une participation si la commune a délibéré et qu’elle a un projet de parc public de stationnement. Si lors de l’instruction, le demandeur remplit les conditions exigées par le PLU, le permis est délivré. À l’issue des travaux, une déclaration attestant l’achèvement des travaux doit être adressée à l’autorité compétente qui vérifie la conformité de ceux-ci. Si ultérieurement les places de stationnement sont dissociées du logement lors de la location, aucune action ne peut être entreprise. En effet, le propriétaire a le droit de jouir et de disposer de son bien tant qu’il n’en fait pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements, (article 544 du code civil). En l’occurrence, la loi laisse le choix au propriétaire-bailleur de louer le garage en annexe du logement ou de manière indépendante à celui-ci. Les règles d’urbanisme ne s’appliquent pas à des rapports contractuels résultant d’un contrat de bail. Par ailleurs, la transformation d’un garage en habitation est soumise à autorisation d’urbanisme, si les travaux envisagés comportent la création d’une surface de plancher supérieure à cinq mètres carrés.

http://questions.assemblee-nationale.fr/q14/14-40838QE.htm

Jérôme MAUDET

avocat au barreau de Nantes

Droit pénal de l’urbanisme : arrêté interruptif et contrôle de conformité des travaux réalisés

Lorsqu’il constate une infraction au Code de l’urbanisme, le maire, en sa qualité d’auxiliaire de l’autorité judiciaire, est tenu de dresser un procès verbal et de le transmettre au Procureur de la République afin que celui-ci apprécie de l’opportunité d’engager ou non l’action publique.

A défaut, sa responsabilité est susceptible d’être recherchée pour carence dans l’exercice de ses pouvoirs de police.

Le maire a également compétence pour ordonner l’interruption des travaux en cours de réalisation après avoir constaté l’infraction.

Par un arrêt du 26 juin 2013, le Conseil d’Etat est toutefois venu rappeler que le Maire ne peut pas ordonner l’interruption de travaux pour lesquels il a délivré une autorisation d’urbanisme demeurée en vigueur.

‘ 1. Considérant qu’il ressort des énonciations de l’arrêt attaqué que, par un arrêté du 29 décembre 1999, le maire de Boulogne-Billancourt a délivré à la SCI Danjou une autorisation de démolir une partie des bâtiments situés au 80 rue d’Anjou, en vue de la réalisation d’un projet immobilier ; que, par un autre arrêté du 9 octobre 2000, le maire ne s’est pas opposé à une déclaration de travaux concernant le même terrain ; que, par un arrêté du 26 avril 2001, le maire, agissant cette fois au nom de l’Etat, après qu’il a été dressé procès-verbal d’infraction en application de l’article L. 480-1 du code de l’urbanisme, a ordonné l’interruption des travaux sur le fondement de l’article L. 480-2 du même code, au motif que ceux-ci n’étaient pas conformes aux autorisations d’urbanisme accordées ; qu’il a pris le 27 juin 2001 un nouvel arrêté d’interruption des travaux, alors que le chantier était toujours arrêté ; que les travaux ont repris, après l’obtention par la société requérante par arrêté du 8 septembre 2001 d’un permis de construire ; que, par un arrêt du 1er avril 2005, la cour d’appel de Versailles a jugé que les travaux étaient conformes aux autorisations accordées à la SCI Danjou et a relaxé son gérant des faits d’exécution de travaux non autorisés par un permis de construire ; que, par un jugement du 8 janvier 2009, le tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande d’indemnisation présentée par la SCI Danjou du chef des préjudices résultant, selon elle, de l’illégalité de l’arrêté du 26 avril 2001 ; que, par un arrêt du 3 août 2010, contre lequel la SCI Danjou se pourvoit en cassation, la cour administrative de Versailles a confirmé ce jugement ;

2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 480-2 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : ‘ L’interruption des travaux peut être ordonnée soit sur réquisition du ministère public agissant à la requête du maire, du fonctionnaire compétent ou de l’une des associations visées à l’article L. 480-1, soit, même d’office, par le juge d’instruction saisi des poursuites ou par le tribunal correctionnel.(…) ; Dès qu’un procès-verbal relevant l’une des infractions prévues à l’article L. 480-4 a été dressé, le maire peut également, si l’autorité judiciaire ne s’est pas encore prononcée, ordonner par arrêté motivé l’interruption des travaux. Copie de cet arrêté est transmise sans délai au ministère public (…) ‘ ; que l’article L. 480-4 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur, dispose que : ‘ L’exécution de travaux ou l’utilisation du sol en méconnaissance des obligations imposées par les titres Ier, II, IV et VI du présent livre, par les règlements pris pour son application ou par les autorisations délivrées en conformité avec leurs dispositions, exception faite des infractions relatives à l’affichage des autorisations ou déclarations concernant des travaux, constructions ou installations, est punie d’une amende comprise entre 8 000 F et un montant qui ne peut excéder, soit, dans le cas de construction d’une surface de plancher, une somme égale à 40 000 F par mètre carré de surface construite, démolie ou rendue inutilisable au sens de l’article L. 430-2, soit, dans les autres cas, un montant de 2 000 000 F. En cas de récidive, outre la peine d’amende ainsi définie un emprisonnement de six mois pourra être prononcé. / Les peines prévues à l’alinéa précédent peuvent être prononcées contre les utilisateurs du sol, les bénéficiaires des travaux, les architectes, les entrepreneurs ou autres personnes responsables de l’exécution desdits travaux (…) ‘ ;

3. Considérant que si le maire, agissant au nom de l’Etat en sa qualité d’auxiliaire de l’autorité judiciaire, peut, en vertu des dispositions du troisième alinéa de l’article L. 480-2 du code de l’urbanisme, interrompre les travaux pour lesquels a été relevée, par procès-verbal dressé en application de l’article L. 480-1 du même code, une infraction mentionnée à l’article L. 480-4, résultant soit de l’exécution de travaux sans les autorisations prescrites par le livre IV du code de l’urbanisme, soit de la méconnaissance des autorisations délivrées, il ne peut légalement prendre un arrêté interruptif pour des travaux exécutés conformément aux autorisations d’urbanisme en vigueur à la date de sa décision et ce même s’il estime que les travaux en cause méconnaissent les règles d’urbanisme et notamment le document local d’urbanisme ; ‘ (CE, 26 juin 2013, N°344331)

Jérôme MAUDET

Avocat

Droit pénal de l’urbanisme : comment contester utilement un procès verbal de constat d’infraction ?

Le constat d’une infraction au Code de l’urbanisme donne lieu à la rédaction d’un procès-verbal d’un genre particulier.

L’article 430 du Code de procédure pénale dispose en effet que:

« Sauf dans les cas où la loi en dispose autrement, les procès-verbaux et les rapports constatant les délits ne valent qu’à titre de simples renseignements.« 

Les procès-verbaux de constat d’infractions au droit de l’urbanisme font précisément partie de ces dérogations puisque l’article L.480-1 du Code de l’urbanisme dispose que :

« Les infractions aux dispositions des titres Ier, II, III, IV et VI du présent livre sont constatées par tous officiers ou agents de police judiciaire ainsi que par tous les fonctionnaires et agents de l’Etat et des collectivités publiques commissionnés à cet effet par le maire ou le ministre chargé de l’urbanisme suivant l’autorité dont ils relèvent et assermentés. Les procès-verbaux dressés par ces agents font foi jusqu’à preuve du contraire (…) »

Ainsi, le contenu des procès-verbaux de constat d’infractions au Code de l’urbanisme ne peuvent être remis en cause que par un témoignage ou par écrit conformément aux dispositions de l’article 431 du Code de procédure pénale:

« Dans les cas où les officiers de police judiciaire, les agents de police judiciaire ou les fonctionnaires et agents chargés de certaines fonctions de police judiciaire ont reçu d’une disposition spéciale de la loi le pouvoir de constater des délits par des procès-verbaux ou des rapports, la preuve contraire ne peut être rapportée que par écrit ou par témoins. »

Un prévenu ne peut donc se contenter de nier les faits, il doit nécessairement apporter la preuve contraire aux constatations contenues dans les procès-verbaux.

Voir notamment en ce sens (CA Paris, 12 févr. 2002, N° 01/02327).

 » Hormis de simples allégations, le mise en cause n’a apporté aucune preuve contraire aux constatations contenues dans les procès verbaux des 23 juin 1999 et 15 février 2000. »

 

Jérôme MAUDET

Avocat