Droit administratif : liquidation de l’astreinte par le juge
Le juge du fond apprécie souverainement l’existence d’une situation d’inexécution justifiant la liquidation de l’astreinte conformément aux dispositions de l’article L. 911-7 du Code de justice administrative.
Cet article dispose que :
» En cas d’inexécution totale ou partielle ou d’exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l’astreinte qu’elle avait prononcée.
Sauf s’il est établi que l’inexécution de la décision provient d’un cas fortuit ou de force majeure, la juridiction ne peut modifier le taux de l’astreinte définitive lors de sa liquidation.
Elle peut modérer ou supprimer l’astreinte provisoire, même en cas d’inexécution constatée. »
Si elle l’estime opportun, la juridiction peut repousser la date d’effet de l’astreinte sans our autant accorder au débiteur un délai supplémentaire notamment pour évacuer les lieux.
Le juge administratif peut également limiter le taux de l’astreinte lors de la liquidation, en raison de la bonne volonté manifestée par le débiteur de l’obligation (CAA Marseille, 10 avr. 2006, n° 03MA01777).
Le juge a ainsi refusé de liquider une astreinte lorsqu’une commune justifié des diligences qui lui étaient demandées. (CE, 27 nov. 1996, n° 124244) ou en cas de dépassement mineur du délai imparti.
Voir en ce sens :
« 5. Considérant qu’il résulte de l’instruction que le ministre de la défense a, dès le 6 décembre 2014, soit dans le délai de deux mois suivant la notification de l’arrêt susmentionné du 7 octobre 2014, fait connaître à M. B…les suites qu’il entendait donner à sa demande d’avancement ; qu’ainsi, le ministre intimé a accompli les diligences nécessaires pour exécuter intégralement les arrêts de la cour de céans rendus les 19 juin 2007 et 7 octobre 2014 ; qu’il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu pour la cour de procéder à une liquidation de l’astreinte infligée par le premier article du second de ces arrêts ; » (CAA de MARSEILLE, 8ème chambre – formation à 3, 08/12/2015, 14MA01616)
Ou encore :
« 5. Considérant qu’il résulte de l’instruction que l’arrêt rendu par la Cour le 6 février 2014 a été notifié le 11 suivant à la CCIPPO ; que, certes l’exécution totale de cet arrêt a été établie par la transmission à la Cour le 11 juillet 2014, soit plus de deux mois après sa notification, d’une décision de réintégration non datée ; que, cependant, dans les circonstances de l’espèce, ce retard ne justifie pas qu’il soit procédé à la liquidation de ladite astreinte ; » (Cour Administrative d’Appel de Marseille, 9ème chambre – formation à 3, 19/12/2014, 13MA03432)
Voir également a contrario à propos d’une contravention de grande voirie :
« 3. Considérant, en deuxième lieu, qu’en présence d’une contravention de grande voirie, le juge administratif qui, ayant enjoint au contrevenant de libérer sans délai le domaine public et prononcé une astreinte provisoire, se prononce sur sa liquidation peut, le cas échéant, modérer l’astreinte provisoire ou la supprimer, même en cas d’inexécution de la décision juridictionnelle ; que cette faculté doit s’exercer en tenant compte des diligences effectuées par le contrevenant pour exécuter sa décision ou, le cas échéant des mesures prises par la personne qui a obtenu le bénéfice de l’astreinte en vue de faire exécuter la décision d’injonction ou de l’existence d’une démarche contractuelle révélant que la partie bénéficiaire de l’astreinte n’entend pas poursuivre l’exécution de la décision juridictionnelle ; qu’en l’espèce, M. C… ne fait état d’aucune diligence accomplie pour déférer à l’injonction prononcée le 30 juin 2010, il y a plus de cinq ans, ni d’aucune difficulté à laquelle il aurait été confronté pour assurer la pleine exécution du jugement ; qu’ainsi qu’en atteste la démarche accomplie par le département en saisissant le tribunal, le bénéficiaire de l’astreinte entend poursuivre l’exécution de la décision juridictionnelle ; que M. C…se cantonne à des considérations liées aux difficultés financières auxquelles il se trouve confronté du fait de la liquidation prononcée ; que l’intéressé s’étant lui-même exposé à ce que l’astreinte soit liquidée du fait de sa propre carence, et, d’ailleurs, à ce qu’elle le soit à nouveau pour la période de déjà plus de huit cents jours qui continue à courir, ces considérations ne sauraient, en l’espèce, justifier ni une modération de l’astreinte prononcée ni, a fortiori, sa suppression ; » (CAA de MARSEILLE, 7ème chambre – formation à 3, 13/10/2015, 14MA05134)
Jérôme MAUDET
Avocat