Permis de construire : la fraude corrompt tout

Fraus omnia corrumpit.

Tout acte obtenu par fraude peut être retiré ou abrogé sans condition de délai (CE, 13 juin 2003, préfet Jura c/ Cattin N° 250503).

L’Administration est tenue de prononcer le retrait de sa décision :

« Le permis de construire litigieux a été obtenu à la suite de manoeuvres frauduleuses de son titulaire. Ainsi, il n’a pu créer de droits à son profit. Par suite, le maire saisi de la demande du requérant, même si celle-ci avait été présentée après l’expiration du délai de recours contentieux à l’encontre dudit permis, était tenu d’en prononcer le retrait. Par conséquent, il y a lieu d’annuler la décision implicite du maire refusant de retirer son arrêté du 8 août 1988. » (CAA Marseille, 1er juill. 1999, Morisson : JurisData n° 1999-111062).

L’appréciation de l’existence d’une fraude ayant conduit à l’obtention d’une décision relève de l’appréciation souveraine des juges du fond.

Le juge administratif entend assez largement la notion de fraude.

Il n’en demeure pas moins que la fraude doit être prouvée :

« En l’espèce, l’allocation pouvait être attribuée pour les 120 salariés d’un établissement licenciés pour motif économique et âgés de moins de cinquante-six ans et deux mois. Cette allocation été supprimée à un salarié algérien qui, pour obtenir du tribunal algérien de première instance la rectification de sa date de naissance uniquement dans le but d’obtenir le bénéfice de l’allocation litigieuse. Les radiographies effectuées révèlent que son âge se situe, sans certitude aux alentours de cinquante et un ou cinquante neuf ans, et vraisemblablement aux alentours de la soixantaine plutôt que de la cinquantaine. La fraude alléguée par l’administration n’est donc pas établie et ne pouvait justifier l’interruption du versement de l’allocation en cause. La décision du ministre rejetant le recours gracieux de l’intéressé est donc annulée. » (CAA Nantes, 29 juin 2001, Zoubairi : JurisData n°2001-175157)

 

 

Urbanisme : illégalité formelle, compétence liée ou pouvoir d’appréciation

Un décision administrative doit respecter un certain formalisme faute de quoi celle-ci est illégale.

A titre d’exemple, en application de l’article 4 de la loi du 12 avril 2000 toute décision doit porter mention du nom et du prénom son auteur :

« Dans ses relations avec l’une des autorités administratives mentionnées à l’article 1er, toute personne a le droit de connaître le prénom, le nom, la qualité et l’adresse administratives de l’agent chargé d’instruire sa demande ou de traiter l’affaire qui la concerne ; ces éléments figurent sur les correspondances qui lui sont adressées. Si des motifs intéressant la sécurité publique ou la sécurité des personnes le justifient, l’anonymat de l’agent est respecté.

Toute décision prise par l’une des autorités administratives mentionnées à l’article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. »

Ainsi, lorsque l’auteur de l’acte omet de mentionner ses nom et prénom la décision encourt l’annulation.

Encore faut-il qu’il existe une ambiguïté :

« 4. Considérant, au surplus, qu’aux termes de la loi du 12 avril 2000 susvisée :  » (…) Toute décision prise par l’une des autorités administratives mentionnées à l’article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci.  » ; que si la société  » LC Appro  » soutient que l’arrêté litigieux ne mentionne pas, en méconnaissance de ces dispositions, le nom et le prénom du maire d’Aubagne, il comporte sa qualité et sa signature ; qu’en l’espèce, il n’en résultait pour la société requérante aucune ambiguïté quant à l’identité du signataire de cet acte ; » (CAA MARSEILLE, 7 Novembre 2014, N°13MA00761).

Par ailleurs, le moyen tiré de l’irrégularité formelle de l’acte attaqué est insusceptible de prospérer si l’auteur de l’acte se trouvait dans le cadre d’une compétence liée.

Le juge administratif considère en effet, que lorsque l’administration n’a d’autre choix que de prendre une décision dans un sens donné, il ne saurait lui être reprochée une quelconque illégalité formelle.

Encore faut-il que l’auteur de l’acte n’ait aucune marge d’appréciation.

C’est ce qu’est venue rappeler la Cour d’appel de Marseille dans un arrêt du 13 mars 2015 :

« 8. Considérant qu’il est constant que l’arrêté de refus de permis de construire du 14 avril 2011, qui doit être regardé comme portant retrait d’un permis de construire tacite, n’a pas été précédé de la mise en oeuvre de la procédure contradictoire prescrite par les dispositions précitées de la loi du 12 avril 2000, laquelle a le caractère d’une garantie dont la société requérante a été effectivement privée ; que si le tribunal administratif de Montpellier a relevé que le maire était tenu de retirer le permis de construire illégalement délivré, il ressort toutefois des pièces du dossier que le maire était nécessairement conduit, pour relever l’éventuelle illégalité du permis en litige, à porter une appréciation sur les faits de l’espèce, notamment sur la question de savoir si le projet d’extension était conforme aux exigences des dispositions du plan local d’urbanisme local applicables en zone agricole, où le projet est implanté ; qu’ainsi, contrairement à ce que les premiers juges ont estimé, le maire n’était pas en situation de compétence liée pour retirer le permis tacite et le moyen d’irrégularité de la procédure n’est, par suite, pas inopérant ; » (Cour administrative d’appel MARSEILLE Chambre 9, 13 Mars 2015 , N°13MA02884).

Jérôme MAUDET

Avocat au barreau de Nantes

 

Droit de la construction : L’intérêt du référé préventif en droit administratif

A l’occasion de travaux publics, il peut être intéressant pour une commune ou l’un de ses mandataires, de faire établir un constat des propriétés avoisinantes afin de prévenir toute contestation ultérieure.

Un constat d’huissier est envisageable ainsi qu’une expertise amiable réalisée par un homme de l’art.

Toutefois, ces deux méthodes sont loin de pouvoir rivaliser avec une expertise judiciaire contradictoire.

En effet, une telle expertise sera opposable aux parties à la cause et la mission confiée à l’homme de l’art pourra se poursuivre pendant toute la durée des travaux.

En outre, en cas de difficulté de quelque nature que ce soit, il pourra en être référé au juge en charge du contrôle des expertise.

Dans le cadre de travaux publics, la compétence juridictionnelle pour désigner un expert aux fins de constat préventif appartient au juge adminsitratif.

Le juge des référés peut, sur simple requête qui peut être présentée sans ministère d’avocat et même en l’absence d’une décision administrative préalable, désigner un expert pour constater sans délai les faits qui seraient susceptibles de donner lieu à un litige devant la juridiction.

L’article R. 532-1 du Code de justice administrative dispose en effet que :

« Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l’absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d’expertise ou d’instruction.

Il peut notamment charger un expert de procéder, lors de l’exécution de travaux publics, à toutes constatations relatives à l’état des immeubles susceptibles d’être affectés par des dommages ainsi qu’aux causes et à l’étendue des dommages qui surviendraient effectivement pendant la durée de sa mission.

Les demandes présentées en application du présent chapitre sont dispensées du ministère d’avocat si elles se rattachent à des litiges dispensés de ce ministère. »

La mission de l’expert proposée au Tribunal dépend de différents paramètres et notamment de la configuration des lieux et des protagonistes (copropriété, centre ville, campagne….)

L’objectif est de faire dresser un état descriptif et qualitatif des immeubles riverains.

Ainsi, si des fissures apparaissent sur lesdits immeubles en cours de chantier, la collectivité devra prendre en charge les frais de réparation ou les faire supporter aux entreprises ou à son assureur.

Inversement les fissures préexistantes ne pourront donner lieu à aucune demande de la part des riverains.

Il est également intéressant de solliciter du juge des référés que l’expert puisse s’adjoindre les conseils d’un sapiteur dans des cas précis (risque de pollution voire d’effondrement, milieu sensible….).

Dans le cadre d’une telle procédure les collectivités ont souvent intérêt à rendre opposables les opérations d’expertise aux entreprises en charge des travaux.

Du point de vue de la procédure, et à l’inverse de la procédure judiciaire, c’est le greffe du Tribunal qui se charge de la notification des requêtes aux défendeurs et non un huissier.

Le coût pour la collectivité s’avère donc moins important que dans le cadre d’une procédure initiée sur le fondement des dispositions de l’article 145 du Code de procédure civile.

Aucune consignation ne sera exigée avant le début des opérations d’expertise.

Le montant des frais d’expertise sera fixé par ordonnance de taxe qui intervient après le début des opérations d’expertise, voire même après le dépôt du rapport.

En règle générale, il convient de prévoir un délai d’environ un mois entre le dépôt de la requête et la désignation d’un expert judiciaire.

Jérôme MAUDET

Avocat au Barreau de NANTES

 

Droit pénal de l’urbanisme : délais de transmission des procès-verbaux

Les infractions au Code de l’urbanisme doivent être constatées par un agent assermenté dûment habilité à cet effet.

En principe, le Procès-Verbal d’infraction doit être transmis au Parquet avant l’expiration d’un délai de 3 jours.

L’article 29 du Code de procédure pénale dispose en effet que :

« Les gardes particuliers assermentés constatent par procès-verbaux tous délits et contraventions portant atteinte aux propriétés dont ils ont la garde.

Les procès-verbaux sont remis ou envoyés par lettre recommandée directement au procureur de la République. Cet envoi doit avoir lieu, à peine de nullité, dans les trois jours au plus tard, y compris celui où ils ont constaté le fait, objet de leur procès-verbal. »

Le non-respect de ces délais de 3 jours est toutefois apprécié avec bienveillance par le juge judiciaire en application de l’adage « pas de nullité sans grief » :

« Attendu que, pour rejeter l’exception tirée de la nullité du procès-verbal de constat du 13 septembre 2007, l’arrêt retient notamment que la nullité prévue par l’article 29 du code de procédure pénale, qui n’est pas une nullité d’ordre public, ni une nullité résultant de la violation des droits de la défense, ne fait pas grief aux prévenus dès lors qu’ils ne sont pas directement lésés, ni même concernés par cette irrégularité relative au délai de transmission de la procédure au procureur de la République, et qu’il n’est d’ailleurs pas allégué par les appelants que l’inobservation de ce délai ait porté atteinte à leurs intérêts ; » (Cass. Crim. 7 décembre 2010. N° de pourvoi: 10-81729)

Il n’en demeure pas moins préférable de respecter le délai de 3 jours pour éviter tout débat inutile sur ce point.

Jérôme MAUDET

Avocat

Trouble du voisinage : perte de vue et d’ensoleillement

La construction d’une extension crée généralement des désagréments aux voisins déjà installés sur place.

Ces désagréments s’ils sont constitutifs d’un trouble ne sont pas, pour autant, constitutifs d’un trouble anormal du voisinage.

La Cour d’appel de MONTPELLIER a d’ailleurs estimé que l’obstruction d’une vue, à la supposer même « imprenable », ne constitue pas, à elle seule, un trouble anormal de voisinage :

« la vue dont jouit un propriétaire depuis sa maison n’est pas un droit susceptible en lui-même de protection tant qu’il n’y a pas de troubles dépassant l’inconvénient normal de voisinage.

Ainsi, en achetant un chalet implanté sur le lot No33 du « Lotissement du Lac», Les consorts Y… ne pouvaient ignorer que la « vue exceptionnelle sur le lac de MATEMALE et sur les Pyrénées » dont ils jouissaient n’était nullement garantie, et constituait un avantage précaire qui cesserait tôt ou tard lorsqu’une construction serait édifiée sur la parcelle voisine encore non bâtie du même lotissement, le fait que leur maison ait été édifiée en premier ne leur conférant aucune prééminence, aucun droit de s’opposer à des constructions ultérieures sur les fonds voisins.

En d’autres termes, la perte d’agrément – voire même de 25 % de la valeur de leur bien ainsi qu’ils le prétendent – pouvant résulter de la réduction de la vue causée par l’implantation du nouvel immeuble, ne peut être considérée en soi comme un trouble anormal ou excessif, dans la mesure où elle ne procède que de l’exercice du droit légitime du propriétaire voisin de construire dans le respect des règles en vigueur, sauf aux époux Y… à rapporter la preuve de circonstances particulières démontrant un abus de ce droit, générateur de troubles excédant les inconvénients normaux du voisinage.

Or force est de constater qu’ils se bornent à faire valoir que leur vue s’arrête désormais à la façade de ce bâtiment qui masque le panorama, mais n’apportent aucun élément concret permettant de démontrer que ce trouble présente un caractère anormal ni que l’immeuble n’a pas été édifié conformément au permis de construire et aux prescriptions d’urbanisme. Au contraire, les photographies produites révèlent que la construction qui les prive en partie de la vue sur le lac n’est pas un bâtiment particulièrement inesthétique, ou encore d’une hauteur de nature à générer un sentiment d’enfermement, mais un chalet en bois d’un étage de belle facture apparente, dans le style du pays.

Ne rapportant pas dès lors la preuve de l’existence des troubles anormaux de voisinage qu’ils invoquent, les consorts Y… seront en conséquence déboutés de toutes leurs demandes. »  (CA MONTPELLIER, 3 juin 2008, N°07/4081).

S’agissant de la perte d’ensoleillement, la jurisprudence a coutume de rappeler que les avantages dont bénéficie un propriétaire, tels qu’une vue dégagée ou un ensoleillement important, ne sont pas des droits acquis, sauf à rendre impossible toute évolution du tissu construit.

« Attendu, selon l’arrêt attaqué (Bordeaux, 6 avril 1993), que M. X… ayant édifié une construction en limite de sa propriété, contiguë à celle de M. Y…, ce dernier se plaignant d’une diminution de l’ensoleillement et de l’éclairement, l’a assigné en dommages-intérêts en invoquant un trouble anormal de voisinage ; (…)

Mais attendu que l’arrêt retient que M. Y… n’est pas fondé à se plaindre d’une diminution de l’ensoleillement et de l’éclairement de sa maison par suite de l’extension de la construction de M. X… en limite de sa propriété et de la perte d’un avantage nécessairement précaire au centre d’une agglomération très peuplée, cet inconvénient ne constituant pas en de telles circonstances un trouble anormal de voisinage ; » (Cass. Civ. 2, 3 mai 1995, pourvoi: N°93-15920)

La Cour d’appel de CAEN a d’ailleurs rappelé qu’en dépit d’une perte d’ensoleillement avérée, la construction d’un hôtel n’est pas de nature à justifier une action pour trouble anormal du voisinage.

« Ne constitue pas un trouble anormal de voisinage l’édification, sur un terrain jouxtant l’immeuble des revendiquants, d’un hôtel.

 En effet, les propriétaires d’appartements n’ont d’une part aucun droit acquis opposable à la société d’investissement de bénéficier d’une vue sur la mer telle qu’elle empêche la construction d’un immeuble de 3 ou 4 étages. (…)

Enfin, sur l’ensoleillement, dans une zone relativement urbanisée, une perte d’ensoleillement en fin de soirée est dans l’ordre des choses, étant observé que la clarté peut continuer sans ensoleillement direct. » (Cour d’appel de Caen, 17 Mars 2009, N°07/03576).

Par un arrêt du même jour la Cour d’appel de MONTPELLIER a confirmé cette position :

« la perte d’ensoleillement, limitée, qui procède de l’exercice du droit légitime du propriétaire voisin d’édifier une maison, ne constitue pas, alors que les constructions sont situées dans un milieu urbain et constructible où nul ne dispose d’un droit acquis sur l’environnement et où chacun peut s’attendre à être privé d’un avantage en fonction de l’évolution du contexte, un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage et ouvrant droit à réparation. » (Cour d’appel de MONTPELLIER, 17 mars 2009, N° 07/03576).

Jérôme MAUDET

Avocat au barreau de NANTES

 

Droit des collectivités : permis de construire et corruption

L’octroi d’une libéralité destinée à favoriser la délivrance d’un permis de construire peut constituer un délit de corruption passive ou active suivant que l’on se place du côté de la collectivité ou de l’entreprise.

L’article 432-11 du Code pénal précise en effet que :

« Est puni de dix ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public, ou investie d’un mandat électif public, de solliciter ou d’agréer, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques, pour elle-même ou pour autrui :

 1° Soit pour accomplir ou s’abstenir d’accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat ou facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat ;

2° Soit pour abuser de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d’une autorité ou d’une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable.

L’article 433-1 du même Code dispose que :

« Est puni de dix ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende le fait, par quiconque, de proposer, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques à une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public ou investie d’un mandat électif public, pour elle-même ou pour autrui, afin :

1° Soit qu’elle accomplisse ou s’abstienne d’accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat, ou facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat ;

2° Soit qu’elle abuse de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d’une autorité ou d’une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable.

Est puni des mêmes peines le fait de céder à une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public ou investie d’un mandat électif public qui sollicite, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques, pour elle-même ou pour autrui, afin d’accomplir ou de s’abstenir d’accomplir un acte visé au 1° ou d’abuser de son influence dans les conditions visées au 2°. »

L’article 433-2 précise également que :

 « Est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende le fait, par quiconque, de solliciter ou d’agréer, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques, pour lui-même ou pour autrui, afin d’abuser de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d’une autorité ou d’une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable.

 Est puni des mêmes peines le fait de céder aux sollicitations prévues au premier alinéa ou de proposer, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques à une personne, pour elle-même ou pour autrui, afin qu’elle abuse de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d’une autorité ou d’une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable. »

 Selon la Cour de cassation, le délit est constitué, y compris lorsque le profit retiré par le corrompu peut être indirect.

 Tel est notamment le cas lorsqu’une commune soumet la délivrance d’un permis de construire à une contrepartie :

 « Attendu que, pour déclarer Alain X… coupable de corruption passive, l’arrêt attaqué et le jugement qu’il confirme énoncent que la somme d’argent que celui-ci a indûment réclamée en contrepartie de la délivrance d’un permis de construire devait profiter à la commune dont il était le maire ;

 Attendu qu’en l’état de ces énonciations, et dès lors que le profit retiré par le corrompu peut être indirect, la cour d’appel a justifié sa décision au regard de l’article 432-11 du code pénal, dans sa rédaction alors en vigueur ; » (Cass. crim., 20 mai 2009, n° 08-83.789 : JurisData n° 2009-049202).

Jérôme MAUDET

Avocat

Urbanisme : l’extension exige-t-elle une déclaration préalable ou un permis de construire

La réalisation d’une extension d’un immeuble bâti répond à un régime juridique différent en fonction

– la surface de plancher créée,

– l’emprise au sol du projet,

– l’existence d’un plan local d’urbanisme,

– la surface de la construction existante.

L’article R.421-17 du Code de l’urbanisme dans sa rédaction issue du Décret n°2014-253 du 27 février 2014 et entré en vigueur le 1er avril suivant dispose en effet que :

« Doivent être précédés d’une déclaration préalable lorsqu’ils ne sont pas soumis à permis de construire en application des articles R*421-14 à *R. 421-16 les travaux exécutés sur des constructions existantes, à l’exception des travaux d’entretien ou de réparations ordinaires, et les changements de destination des constructions existantes suivants :

 a) Les travaux ayant pour effet de modifier l’aspect extérieur d’un bâtiment existant, à l’exception des travaux de ravalement ;

 b) Les changements de destination d’un bâtiment existant entre les différentes destinations définies à l’article R*123-9 ; pour l’application du présent alinéa, les locaux accessoires d’un bâtiment sont réputés avoir la même destination que le local principal ;

 c) Dans les secteurs sauvegardés dont le plan de sauvegarde et de mise en valeur n’est pas approuvé ou dont le plan de sauvegarde et de mise en valeur a été mis en révision, les travaux effectués à l’intérieur des immeubles ;

 d) Les travaux exécutés sur des constructions existantes ayant pour effet de modifier ou de supprimer un élément que le plan local d’urbanisme ou un document d’urbanisme en tenant lieu a identifié, en application du 7° de l’article L. 123-1-5, comme présentant un intérêt patrimonial ou paysager ;

 e) Les travaux exécutés sur des constructions existantes ayant pour effet, dans une commune non couverte par un plan local d’urbanisme, de modifier ou de supprimer un élément, qu’une délibération du conseil municipal, prise après enquête publique, a identifié comme présentant un intérêt patrimonial ou paysager ;

f) Les travaux qui ont pour effet la création soit d’une emprise au sol, soit d’une surface de plancher supérieure à cinq mètres carrés et qui répondent aux critères cumulatifs suivants :

  • une emprise au sol créée inférieure ou égale à vingt mètres carrés ;
  • une surface de plancher créée inférieure ou égale à vingt mètres carrés.

 Ces seuils sont portés à quarante mètres carrés pour les projets situés en zone urbaine d’un plan local d’urbanisme ou d’un document d’urbanisme en tenant lieu, à l’exclusion de ceux impliquant la création d’au moins vingt mètres carrés et d’au plus quarante mètres carrés de surface de plancher ou d’emprise au sol lorsque cette création conduit au dépassement de l’un des seuils fixés à l’article R*431-2 du présent code.

 g) ) la transformation de plus de cinq mètres carrés de surface close et couverte non comprise dans la surface de plancher de la construction en un local constituant de la surface de plancher. »

Ainsi, la création d’une extension supérieure de 24 m² n’ayant pas pour effet de porter la surface de plancher ou l’emprise au sol totale au-delà de 170 m² dans une commune dotée d’un PLU n’est pas soumise à permis de construire.

Il en irait différemment si la commune  n’était pas dotée d’un PLU ou si l’extension aboutissait in fine à porter la surface du plancher ou l’emprise au sol à plus de 170 m².

Le non respect de ces dispositions est passible de sanctions pénales.

Jérôme MAUDET

Avocat

Droit pénal de l’urbanisme et loi ALUR : un renforcement des sanctions

L’article L.480-7 du Code de l’urbanisme a été modifié par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové dite (ALUR)

Cet article prévoyait la possibilité pour le juge judiciaire d’ordonner sous astreinte la remise en état des lieux.

L’astreinte était toutefois cantonnée à 75 euros par jour de retard ce qui pouvait ne pas être dissuasif pour certains constructeurs.

Pour pallier cette difficulté, la loi ALUR porte opportunément le montant de l’astreinte à 500 euros par jour de retard et rappelle que l’exécution provisoire peut être ordonnée par le Tribunal pour éviter les recours dilatoires.

« Le tribunal impartit au bénéficiaire des travaux irréguliers ou de l’utilisation irrégulière du sol un délai pour l’exécution de l’ordre de démolition, de mise en conformité ou de réaffectation ; il peut assortir son injonction d’une astreinte de 500 € au plus par jour de retard.

 L’exécution provisoire de l’injonction peut être ordonnée par le tribunal.

Au cas où le délai n’est pas observé, l’astreinte prononcée, qui ne peut être révisée que dans le cas prévu au troisième alinéa du présent article, court à partir de l’expiration dudit délai jusqu’au jour où l’ordre a été complètement exécuté.

Si l’exécution n’est pas intervenue dans l’année de l’expiration du délai, le tribunal peut, sur réquisition du ministère public, relever à une ou plusieurs reprises, le montant de l’astreinte, même au-delà du maximum prévu ci-dessus.

Le tribunal peut autoriser le reversement ou dispenser du paiement d’une partie des astreintes pour tenir compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter. »

Rappelons que la remise en état, prononcée au titre de l’article L.480-5 du Code de l’urbanisme, étant une mesure à caractère réel, destinée à mettre fin au préjudice de la partie civile, la commune est, elle aussi, bien fondée à solliciter une telle mesure au titre de l’action civile : (Voir notamment en ce sens, Cass. Crim, 22 novembre 1990, N° 90-81.142).

 « Mais attendu que la mise en conformité des lieux ou des ouvrages, la démolition de ces derniers ou la réaffectation du sol, prévues par l’article L. 480-5 du Code de l’urbanisme, constituent des mesures à caractère réel destinées à faire cesser une situation illicite, et non des sanctions pénales ; »

Jérôme MAUDET

Avocat au barreau de Nantes.

 

Stationnement résidentiel ou les limites du droit de l’urbanisme

Interrogée sur la problématique du stationnement résidentiel, la ministre du logement a concédé que le droit de l’urbanisme n’est pas en mesure de régler l’ensemble des problématiques inhérentes à l’occupation du sol.

Texte de la question

M. André Chassaigne attire l’attention de Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement sur les recours possibles des maires suite au non-respect des conditions d’obtention du permis de construire par les propriétaires-bailleurs. En effet, certaines préconisations exigibles pour l’obtention d’un permis de construire ne sont ensuite pas respectées par les demandeurs, propriétaires louant leur logement par exemple. Ainsi, de nombreux maires exigent dans les bourgs-centre la définition de places de stationnement pour tout appartement rénové et loué, ceux-ci devant figurer sur les plans de la construction. Après la réalisation des travaux, les propriétaires font le choix d’exclure la possibilité de se garer aux places représentées dans les baux des locataires. Cette situation entraîne de graves problèmes de circulation sur la voie publique, en particulier dans les bourgs anciens et denses. Un autre exemple récurrent de difficultés peut être soulevé concernant la transformation des garages des habitations en pièce habitable ou aménagée. Là-aussi, ces modifications des fonctions du bâti entraînent une recrudescence des incivilités et stationnements intempestifs en centre-ville, alors même que le stationnement est souvent limité et règlementé. De nombreuses municipalités se retrouvent impuissantes devant ces agissements, et souhaiteraient pouvoir disposer de mesures concrètes pour faire respecter le droit de l’urbanisme. Il souhaiterait donc connaître les possibilités légales d’intervention existantes pour les maires, et si elle prévoit de nouvelles dispositions dans ce domaine.

Texte de la réponse

L’obtention du permis de construire est soumise aux règles du plan local d’urbanisme (PLU). En l’absence de PLU, le règlement national d’urbanisme s’applique, notamment l’article R. 111-6 du code de l’urbanisme. Lors de la délivrance du permis de construire, l’article 12 concernant les règles de stationnement doit être respecté. Toutefois, l’article L. 123-1-12 du code de l’urbanisme prévoit des modalités alternatives pour la satisfaction des obligations de réalisation de stationnements : obtention d’une concession à long terme dans un parc public de stationnement, acquisition des places de stationnement dans un parc privé, ou en dernier ressort, paiement d’une participation si la commune a délibéré et qu’elle a un projet de parc public de stationnement. Si lors de l’instruction, le demandeur remplit les conditions exigées par le PLU, le permis est délivré. À l’issue des travaux, une déclaration attestant l’achèvement des travaux doit être adressée à l’autorité compétente qui vérifie la conformité de ceux-ci. Si ultérieurement les places de stationnement sont dissociées du logement lors de la location, aucune action ne peut être entreprise. En effet, le propriétaire a le droit de jouir et de disposer de son bien tant qu’il n’en fait pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements, (article 544 du code civil). En l’occurrence, la loi laisse le choix au propriétaire-bailleur de louer le garage en annexe du logement ou de manière indépendante à celui-ci. Les règles d’urbanisme ne s’appliquent pas à des rapports contractuels résultant d’un contrat de bail. Par ailleurs, la transformation d’un garage en habitation est soumise à autorisation d’urbanisme, si les travaux envisagés comportent la création d’une surface de plancher supérieure à cinq mètres carrés.

http://questions.assemblee-nationale.fr/q14/14-40838QE.htm

Jérôme MAUDET

avocat au barreau de Nantes

Droit pénal de l’urbanisme : comment contester utilement un procès verbal de constat d’infraction ?

Le constat d’une infraction au Code de l’urbanisme donne lieu à la rédaction d’un procès-verbal d’un genre particulier.

L’article 430 du Code de procédure pénale dispose en effet que:

« Sauf dans les cas où la loi en dispose autrement, les procès-verbaux et les rapports constatant les délits ne valent qu’à titre de simples renseignements.« 

Les procès-verbaux de constat d’infractions au droit de l’urbanisme font précisément partie de ces dérogations puisque l’article L.480-1 du Code de l’urbanisme dispose que :

« Les infractions aux dispositions des titres Ier, II, III, IV et VI du présent livre sont constatées par tous officiers ou agents de police judiciaire ainsi que par tous les fonctionnaires et agents de l’Etat et des collectivités publiques commissionnés à cet effet par le maire ou le ministre chargé de l’urbanisme suivant l’autorité dont ils relèvent et assermentés. Les procès-verbaux dressés par ces agents font foi jusqu’à preuve du contraire (…) »

Ainsi, le contenu des procès-verbaux de constat d’infractions au Code de l’urbanisme ne peuvent être remis en cause que par un témoignage ou par écrit conformément aux dispositions de l’article 431 du Code de procédure pénale:

« Dans les cas où les officiers de police judiciaire, les agents de police judiciaire ou les fonctionnaires et agents chargés de certaines fonctions de police judiciaire ont reçu d’une disposition spéciale de la loi le pouvoir de constater des délits par des procès-verbaux ou des rapports, la preuve contraire ne peut être rapportée que par écrit ou par témoins. »

Un prévenu ne peut donc se contenter de nier les faits, il doit nécessairement apporter la preuve contraire aux constatations contenues dans les procès-verbaux.

Voir notamment en ce sens (CA Paris, 12 févr. 2002, N° 01/02327).

 » Hormis de simples allégations, le mise en cause n’a apporté aucune preuve contraire aux constatations contenues dans les procès verbaux des 23 juin 1999 et 15 février 2000. »

 

Jérôme MAUDET

Avocat